Nous dépassons désormais largement les "limites planétaires", seuils de sécurité des principaux processus régulateurs du "système" Terre. Ce qui a déjà des conséquences dramatiques tant pour les populations humaines que pour les écosystèmes naturels dont elles dépendent.
La RSE, qui se limite à faire "moins mal la même chose", ne permet donc pas d’enrayer la dégradation de la situation. Même viser un "impact neutre" des activités humaines n’est pas suffisant: ne plus enlever de briques à un mur largement fragilisé ne lui permet pas de retrouver sa robustesse, il faut le réparer.
C’est sur la base de ces constats qu’un nouveau cap s’offre aujourd’hui aux entreprises : le régénératif.
Cette démarche audacieuse offre des opportunités de transformation hautement stratégiques et inédites. Elle porte également en elle un immense espoir pour nos sociétés et les générations présentes et à venir.
Régénérer, c’est pour l’entreprise s’engager vers la génération d’impacts positifs nets pour les écosystèmes et la société.
Séquestrer plus de carbone que ce que l’entreprise en émet, régénérer davantage de biodiversité que celle négativement impactée par l’activité, renaturer et revégétaliser, augmenter les capacitations des parties prenantes, partager avec elles la valeur et leur offrir un revenu décent, améliorer leur santé physique, émotionnelle et sociale, … sont autant d’exemples d’objectifs régénératifs pouvant être intégrés à une feuille de route stratégique.
La régénération est socio-écologique : elle concerne autant les communautés humaines que le non-humain et les écosystèmes naturels.
D’abord parce que le vivant contient intrinsèquement un « super-pouvoir » : la capacité à se régénérer de lui-même.
Les périodes de confinement récentes ont montré à quelle vitesse la nature pouvait "rejaillir" rapidement même en milieu urbain. La végétation repousse souvent rapidement dans les forêts incendiées, notre corps lui-même se cicatrise tout seul lorsque nous nous sommes blessés… C’est sur cette formidable capacité d’auto-réparation que peut s’appuyer la régénération.
Ensuite, parce que la transformation des entreprises vers le régénératif a déjà démarré et des pionniers – dans le monde entier – offrent des exemples audacieux et inspirants. On y trouve des entreprises dont l’activité est directement connectée au vivant (production alimentaire, cosmétiques…) comme d’autres qui en sont plus éloignées (sociétés de service, industriels…).
Le régénératif, c’est également le cap qu’ont décidé d’emprunter les 150 entreprises de la CEC (Convention des Entreprises pour le Climat) initiée en 2021.
Écouter l'interview de Christophe Sempels "L'entreprise régénérative pour ambition", dans le podcast de Reboot Business, par Julien Devaureix.
Quand on parle de transition de modèle on part souvent de cette idée qu’il va nous falloir consommer moins de ressources, moins d’énergies, moins de matériaux et aussi moins polluer, détruire et extraire.
Mais quand on voit le niveau de dégâts déjà causés sur nos écosystèmes on se dit aussi que ça ne va pas être suffisant, que limiter l’impact de l’activité économique humaine sur l’environnement ne suffira pas, qu’il va nous falloir régénérer le vivant d’une manière ou d’une autre.
Pour certains, parler d’économie régénérative serait au mieux mettre la charrue avant les boeufs ou au pire une utopie, mais pour d’autres comme Christophe, c’est la seule ambition vraiment viable si l’on veut qu’il y ait encore une économie dans quelques décennies et surtout encore un monde vivant au sein duquel les humains puissent s’épanouir, rien que ça.
La régénération entend remettre la vie et le vivant au cœur de chaque action et décision. Ce qui revient à se poser la question: "Cette décision va-t-elle dans le sens de plus ou de moins de vie pour les humains et les non-humains? Permet-elle au vivant d’exprimer tout son potentiel?".
En adoptant tel mode d’organisation ou telle pratique managériale, permet-on aux membres de l’équipe de se sentir pleinement vivants et d’exprimer leurs talents singuliers, leur créativité et leur propension naturelle à trouver des solutions? En concevant ses produits avec tel ou tel composant, va-t-on soutenir la vie dans les écosystèmes et auprès des parties prenantes? Si ces produits finissent dans l’environnement terrestre ou marin, vont-ils bonifier ou dégrader la vie dans ces écosystèmes?
Une entreprise régénérative, c’est donc d’abord une entreprise qui regarde le monde autrement et s’interroge sur son positionnement dans le système économique, social et plus largement vivant au sein duquel elle agit et duquel elle dépend.
N'hésitez pas à nous écrire afin de nous la suggérez. Nous pourrons ainsi l'analyser et potentiellement partager son histoire !
Pour baliser la transformation des organisations vers le régénératif, notre centre de recherche a identifié 11 principes clés pour évoluer vers le régénératif. Ces principes sont autant de dimensions de transformations organisationnelles ou culturelles à évaluer et enclencher.
Pour atteindre le régénératif, l’entreprise va dans un premier temps chercher à comprendre les impacts qu’elle exerce sur les écosystèmes et sur la société.
La mise en œuvre opérationnelle vers le régénératif sera ensuite fonction de la nature de chaque entreprise et de sa relative proximité ou distance avec le vivant. Un viticulteur, par exemple, n’aura pas les mêmes enjeux et leviers d’actions qu’un dirigeant de fonderie ou qu’une entreprise de service numérique. A chaque situation correspond un éventail de portes d’entrée plus ou moins large vers le régénératif.
Dans tous les cas, la bascule vers l’entreprise régénérative requiert de faire évoluer le modèle économique de l’entreprise, et donc le plus souvent son référentiel métier. Un chantier hautement stratégique donc, mais qui lui aussi, s’inspirant du vivant, commence par expérimenter et apprendre au travers de projets pilotes.
Sous peine de nouveau greenwashing ou d’abandon des projets devant les changements à opérer, la transformation vers le régénératif ne peut réussir sans un leadership radicalement renouvelé.
Ce leadership régénératif implique une prise de conscience profonde de la situation actuelle du vivant. Il nécessite une remise en cause de vieilles croyances limitantes (sur la croissance illimitée, la compétition permanente, l’optimisation systématique...) pour s’ouvrir à une nouvelle représentation plus systémique et vivante de l’entreprise.
Il s’ancre ensuite dans une évolution intime et authentique, impliquant la tête mais surtout le coeur et souvent l’être tout entier. Plus aligné avec lui-même, connecté à ses aspirations les plus hautes, le leader régénératif trouve en lui des ressources insoupçonnées pour incarner un changement enthousiasmant pour tous.
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