Véritable cri d’alarme pour la planète, le rapport Meadows, présenté à la presse le 2 mars 1972, alertait sur les limites d’un modèle basé sur une croissance sans fin dans un monde à l’espace et aux ressources pourtant bien bordés.

Projet de recherche inédit à l’époque pour modéliser le futur de l’humanité, Dennis Meadows, Donella Meadows, et Jorgen Randers établirent 13 scénarios et en vinrent à ce constat : si les tendances de croissance, la population du monde, l’industrialisation, la pollution, la production de nourriture et l’épuisement des ressources restent inchangés, les limites à la croissance sur Terre seront atteintes dans les cent prochaines années, débouchant sur un déclin brutal et tragique de la population.

Ardu, technique et dérangeant, le rapport Meadows fait pourtant un tabac. En pleine période des Trente Glorieuses où les croyances dans le progrès et la croissance économique sont reines, plusieurs millions d’exemplaires du livre tiré du rapport “Les limites à la croissance (dans un monde fini) », sont vendus. Le constat dressé est simple : “Si nous ignorons ces limites et que nous poursuivons une croissance fondée sur des politiques à court-terme, nous atteindrons un point de non-retour qui conduira à un effondrement”. ‍

**Aujourd’hui, on en est où ?
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Ce cri d’alarme ne fait malheureusement pas infléchir les politiques publiques et privées. 50 ans plus tard, rien n’est venu démentir la probabilité d’un effondrement. On observe un recouvrement quasiment parfait des trajectoires envisagées en 1972 par le rapport Meadows et du réel observé. En 2004, quand les auteurs reprennent leurs analyses et l’enrichissent de données accumulées durant trois décennies d’expansion sans limite, l’impact destructeur et avéré des activités humaines conforte définitivement leurs conclusions. L’enjeu central de leur livre n’est plus de savoir, comme en 1972, “comment éviter le dépassement”, mais “comment procéder pour revenir dans les limites de la planète”. Aujourd’hui, à l’occasion des 50 ans du livre, une nouvelle édition paraît, avec pour objectif désormais de fournir des clés pour penser et oeuvrer pour la résilience de notre civilisation. Un constat qui fait écho aux conclusions du dernier rapport du GIEC sorti avant-hier : 3,3 milliards de personnes vivent déjà dans des contextes très vulnérables au changement climatique. Un constat qui s’ajoute à celui d’une étude récente confirmant ce que beaucoup redoutaient déjà. Ce ne sont plus 4, mais 5 limites planétaires qui ont à présent dépassé leur seuil d’alerte, faisant un peu plus encore entrer l’humanité dans la zone dangereuse de franchissement de points de bascule pouvant entrainer des perturbations brutales et non linéaires de notre système Terre.

**Alors, comment limiter la casse ?
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Face à l’urgence, il nous faut désormais changer de paradigme. Alors que les acteurs privés et publics s’efforcent depuis plusieurs années de réduire les impacts négatifs de leurs activités sur les écosystèmes et la société, il n’est plus aujourd’hui question de faire moins mal la même chose. Nous devons urgemment réparer, restaurer, régénérer les écosystèmes et les composants de la biosphère desquels nous dépendons et sur lesquels nous agissons, ainsi que les communautés humaines en lien étroit et constant avec ces écosystèmes. Non pas comme des architectes ou des ingénieurs de la réparation, mais en restaurant les conditions permettant aux potentialités du vivant de s’exprimer à nouveau. Le défi est immense. Passer à une économie régénérative, éco-compatible et socialement juste présuppose de revoir en profondeur nos modèles économiques, de favoriser la juste compréhension du vivant et de ses dynamiques propres, de changer nos modes de vie et de pensée, de mobiliser collectivement de nouveaux récits pour réenchanter le futur… Déjà, de nombreuses solutions existent, et n’attendent que nous pour les faire vivre. Un sacré chantier dans lequel chacun.e d’entre nous a son rôle à jouer !

Pour lire l’édition parue à l’occasion des 50 ans de “Limites à la croissance (dans un monde fini)” : https://www.ruedelechiquier.net/l-ecopoche/375-les-limites-a-la-croissance-50-ans.html

Sources :
Meadows, D. (2012, 1 mai). “Les Limites à la croissance (dans un monde fini)“, éditions Rue de l’échiquier.
Drouelle, F. (2022, 16 février). “1972, le rapport Meadows : premier cri d’alarme pour la planète”, Affaires sensibles [Podcast audio]. https://www.franceinter.fr/emissions/affaires-sensibles/affaires-sensibles-du-mercredi-16-fevrier-2022

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